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Tabou sexuel – Le grand paradoxe

Tabou Sexuel - le grand paradoxe

Qui d’entre vous n’a pas vécu cette expérience particulière et commune à la fois ?

L‘arrivée brutale du sujet de la sexualité dans un repas entre amis.

Pas plus tard qu’hier soir, je me faisais ironiquement cette réflexion.

Nous y sommes.

L’intrus s’impose entre le plat de résistance et le dessert.

Il s’installe à la place de l’invité surprise et se révèle sous des aspects grivois.

Il monopolise la discussion au point de nous détourner de notre objectif : le match opposant les valeureux guerriers nationaux aux mâles, dont la testostérone éclabousse mes émotions, dès leurs premiers cris de haka.

Mes idées se précipitent.

Sans doute, aurez vous un avis sur ces questions : Comment se fait-il que le sujet de la sexualité si difficile à aborder dans l’intimité se retrouve régulièrement, à faire un streaptease impudique au centre de la table, entre les bouteilles de vins essorées et les bulles d’eau emprisonnées définitivement dans leur liquide incolore.

D’où vient son pouvoir de semer la discorde entre les  individus : d’un côté des hommes brandissant leur frustration au niveau de leur ceinture, comme des baïonnettes, de l’autre, des femmes en quête de justification au service du maintien de la paix.

Je remonte le fil des événements.

Cette fois je ne suis pas étrangère à la venue de l’hôte embarrassant.

Il paraîtrait même que c’est moi qui l’ai laissé entrer !

Sans doute mes yeux pétillaient-ils à l’évocation de l’effet que procurait sur moi, le chant guerrier de ces mâles, torses nus, aux gestes virils, pénétrants et déterminés.

Aux dires de mon compagnon ma mimique gourmande qui s’en est suivie, accompagnée d’un trémoussement  et du son  évocateur de l’envie ont mis le feu aux poudres.

Ce qui avait été traduit comme une allusion sexuelle, fût considérée comme une provocation.Malgré mes tentatives à pacifier le terrain et à retrouver la sympathie du camp féminin le  :

« Toi au moins tu ne dois pas t’ennuyer ! ça doit être cool de vivre avec une sexologue »

Cinglé au visage de mon compagnon, a fini par réduire à néant toutes mes tentatives d’accord de paix.


La guerre est déclarée et j’en suis responsable.

Salve après salve, les coups sont rendus.

De mon côté, mi-félon, mi agent-double, retranchée avec amusement derrière la muraille d’observation des comportements sexuels de mes contemporains, et bien décidée à ne pas rallonger mes journées de travail, j’ai laissé la guerre se poursuivre en en connaissant déjà l’issue.
Dans quelques heures, on dénombrera les cadavres : on citera les victimes décédés sur le champ de bataille.
Peut-être dressera-t-on une stèle en leur mémoire :

Désir sexuel : mort au combat.

Plaisir sexuel : mort au combat, complicité sexuelle, intimité sexuelle, communication sexuelle, toutes mortes sur le champ de bataille avec d’autres frères d’arme.


Ce qu’en disent des études scientifiques.

 Au delà de l’aspect comique de cette anecdote, la question qui est posée est celle de l’importance du maintien du désir sexuel dans la vie d’un couple et sa capacité à se maintenir lorsque la sexualité est vécue comme une frustration.
Sur ce point, les conclusions des études ne sont guère surprenantes.
Elles confirment la corrélation entre le niveau de satisfaction relationnelle et le maintien de l’activité sexuelle dans un couple.
Elles attestent que l’accès à la sexualité est facilité par la communication et la proximité affective et émotionnelle entre conjoints.
De manière toute aussi attendue, ces études et l’expérience clinique de nombreux professionnels accompagnant les couples dans leurs difficultés sexuelles et relationnelles,  témoignent de l’influence d’un vécu sexuel sur le bien-être de l’individu.
Ainsi, l’absence de sexualité installerait un sentiment de frustration dans lequel le partenaire désireux peut se sentir rejeté(e), éprouver un sentiment d’insécurité, une baisse d’estime de soi pouvant engendrer un état dépressif.
Pour dépasser ce lieu commun de l’importance de la sexualité à la longévité d’un couple, et de manière plus surprenante, une étude américaine menée par le Dr Thomas Holly et publiée dans le JAMA internal medecine en 2014 précise que l’importance accordée à la sexualité par les deux partenaires est plus déterminante dans le maintien d’un vécu sexuel que la qualité des rapports sexuels en eux mêmes.
Pour autant, même si toutes les études et l’expérience clinique confirment cette évidence, d’autres, comme celle menée  sur 31 couples en 2008 par Sinikka Elliott et Debra Umberson, de L’Université du Texas font ressortir ce fait indéniable : le décalage évident dans le désir sexuel des partenaires qui peut être source de conflit.

C’est à mon sens le point important qui explique pourquoi en dépit d’un désir sexuel présent chez les deux partenaires, s’accorder ne semble pourtant pas être une évidence.

Au fait, je désire quoi ?

Revenons à nos moutons, plus particulièrement à notre brebis plus capricieuse que galeuse : le désir sexuel, le trouble-fête de l’harmonie des couples.

Ne nous méprenons pas.

Si l’imaginaire collectif attribue l’absence du désir sexuel aux femmes, il arrive bien plus souvent qu’on ne le croit, que le drapeau de ces messieurs soient en berne.

Le vécu sexuel du couple repose sur la capacité des conjoints à maintenir leur désir sexuel dans le temps.

Pour une meilleure compréhension, il est important d’apporter des définitions précises aux notions utilisées plus bas.

Avoir du désir sexuel c’est anticiper positivement la rencontre sexuelle avec un partenaire ou avec soi même.

L’excitation sexuelle, quant à elle, concerne la réaction physiologique du réflexe de l’érection génitale et de la lubrification vaginale mais aussi les émotions de plaisir vécues dans la sexualité.

L’excitation sexuelle se vit donc aussi bien dans une polarité génitale que dans une polarité émotionnelle.

Elle peut répondre à des besoins des deux natures, ensemble ou de manière séparée.

Il va sans dire que tout désir, qu’il soit sexuel ou non, est motivé par quelque chose.

Sur le plan de la sexualité, le désir sexuel peut être animé par un besoin de fusion. C’est souvent cette forme de désir qui anime le début d’une relation.

La personne mue par ce désir (plus souvent les femmes) recherche de manière non consciente à cimenter un lien émotionnel, affectif et/ou amoureux avec le ou la partenaire.

A ce stade de  début de relation, les rapprochements sexuels animent fortement la polarité émotionnelle du vécu sexuel du couple sans forcément que la volonté de vivre des sensations génitales ne soient présente.

En l’absence de motivation génitale, le désir sexuel s’estompe avec le temps allant parfois jusqu’à ne plus être présent une fois le couple soudé.

Le désir sexuel peut être aussi motivé par le désir d’enfant.

Bien que cette magie de la vie s’opère dans le ventre des femmes, il peut aussi bien concerner certains hommes dans leur demande de relations sexuelles.

Il serait d’ailleurs intéressant d’étudier s’il y a corrélation chez les hommes dont la sexualité est motivée par ce type de désir, et ceux qui présentent le syndrome de la couvade appelée aussi grossesse nerveuse. Une fois la famille constituée, le désir sexuel peine à se maintenir.
Dans d’autres cas, le désir sexuel prend un aspect pulsionnel. Il serait bien trop simple de dire qu’il ne concerne exclusivement que les hommes même si ces derniers sont fortement concernés.Ce désir apparaît alors comme un besoin de décharge qui sert à libérer des tensions génitales ou des charges émotionnelles envahissantes.
Enfin, lorsque le désir sexuel est à la fois motivé par des besoins de nature émotionnelle et des besoins génitaux, ses chances d’être maintenus dans le temps sont plus grandes.

 

Rédigé par Claudie Caufour
Sexothérapeute indépendante
Auteure du Livre Sexualité Epanouie en 15 étapes – Presses du Châtelet
Contributrice indépendante blog Action Plénitude
https://action-plenitude.com

Le 06 Avril 2018